Baudelaire, le poète du Spleen, de la Modernité, de l’Ennui, de la Mort, des Drogues. Plus souvent que Baudelaire, c’est Verlaine que l’on associe à la Musique à cause de La bonne chanson, recueil paru en 1870 et Romances sans paroles en mars 1874, une allusion directe à la musique. Chez Verlaine, « la mélancolie berce de doux chants » les violons blessent son cœur… «l’amour vainqueur chante sur le mode mineur… le silence est profond… en sourdine… et le rossignol chantera ». Qu’en est-il chez Baudelaire ? Peut-on le nommer en référence à la Musique ?
Cet ouvrage ne tend pas à rechercher la raison pour laquelle on attribue à Verlaine ce que l’on refuse généralement à Baudelaire, mais plutôt à démontrer que ce dernier est tout autant susceptible d’être évoqué au même titre que son confrère avec la muse sacrée car il utilise aussi d’une manière récurrente 1) des termes musicaux, 2) des noms d’instruments de musique 3) des métaphores musicales, 4) des images auditives. Dans le cadre de cette étude, ces catégories différentes sont groupées sous la dénomination commune de thèmes musicaux.
Nous étudions la place de la musique dans la vie de Baudelaire selon lui-même. Dans ce dessein, nous nous servons de sa correspondance et de ses critiques littéraires et musicales. Nous analysons ensuite, brièvement, les instruments de musique cités par Baudelaire et leur capacité à représenter les sentiments humains ou les associations qu’ils évoquent, en nous basant sur les définitions données par Berlioz dans le Traité de l’Instrumentation et de l’Orchestration. Comme le déclare Jules Combardieu, «Il y a en musique une science dont le principe fondamental est l’assimilation des sons aux couleurs : c’est la science de l’instrumentation.» Baudelaire n’a-t-il pas dit lui-même :
Car ce qui serait vraiment surprenant, c’est que le son ne pût pas suggérer la couleur, que les couleurs ne pussent pas donner l’idée d’une mélodie, et que le son et la couleur fussent impropres à traduire des idées ; les choses s’étant toujours exprimées par une analogie réciproque, depuis le jour où Dieu a proféré le monde comme une complexe et indivisible totalité.
En dernier lieu, nous renvoyons au corpus réunissant l’ensemble des thèmes musicaux employés par l’auteur dans la totalité de son œuvre. Ce corpus, présenté sans aucune prétention à l’exhaustivité, l’est uniquement dans le but d’éclaircir la présente étude, et est divisé en deux parties. L’une traite de La Fanfarlo et Le Speen de Paris, l’autre des Fleurs du Mal.
Baudelaire et la musique, Tunis, Éditions Sahar, 2005